"Une vie entre deux océans" de M.L. Stedman : le bébé de la discorde




Voilà un livre à côté duquel je suis complètement passée à sa sortie. Comme vous le savez sans doute si vous lisez mon blog, je suis assez sujette à la nostalgie et penche très fortement vers le passé, en particulier en ce qui concerne la littérature. Je ne lis que très peu de contemporains, hormis un petit cercle d'écrivains majoritairement anglo-saxons : Joyce Carol Oates, Laura Kasischke, John Irving, Joanna Trollope, Stephen King, Tracy Chevalier, Edna O'Brien et quelques autres. Vous remarquerez d'ailleurs que ce ne sont pas des perdreaux de l'année, puisque la plupart d'entre eux ont allègrement dépassé la soixantaine.

Globalement, je me méfie donc des nouveaux et jeunes auteurs, et je me méfie encore plus des best-sellers. "Une vie entre deux océans" n'avait donc a priori rien pour me séduire, puisque c'est un premier roman et qu'il s'est écoulé à plusieurs millions d'exemplaires. Mais une amie me l'a collé dans les mains en m'ordonnant de le lire, et comme j'avais une bonne gueule de bois et pas assez d'énergie pour protester j'ai dit : "d'accord, mais maintenant va-t-en et laisse moi cuver mon whisky ou je te vomis dessus".

Moralité, elle est partie et j'ai lu le livre. 

Alors, tout d'abord, résumons brièvement le roman pour ceux qui comme moi sont passés à côté de ce phénomène d'édition : Tom Sherbourne, marqué par les horreurs de la première guerre mondiale, rentre en Australie et devient gardien de phare. Sa femme Isabel et lui s'installent sur l'île de Janus, sauvage, désolée et coupée du monde.

Le couple serait parfaitement heureux s'il n'y avait un désir d'enfant perpétuellement contrarié, un désir profond de fonder une famille qu'ils ne parviennent pas à concrétiser. 

Jusqu'au jour où une embarcation s'échoue sur le rivage, avec à son bord un homme décédé et un bébé.

Tom et Isabel décident alors de ne pas signaler l'incident et de garder la petite fille, sans se douter des conséquences que cela va engendrer...

Bon, premier point négatif, le désir d'enfant est un sujet qui ne me touche absolument pas. J'ai horreur des mômes, ces petites bêtes braillardes et turbulentes qui crient, pleurent, réclament, exigent, se roulent par terre et empiètent sans vergogne sur votre espace vital. Je mourais d'envie de dire à Isabel et Tom : "Eh, vous êtes peinards, vous pouvez baiser dans toutes les pièces, faire la grasse matinée, vous baignez nus, vivre libre, pourquoi vous tenez absolument à vous reproduire ?" C'est vrai quoi, quand quelqu'un me dit qu'il veut un enfant j'ai toujours l'impression d'entendre : "s'il vous plait, je n'en peux plus de la liberté, laissez-moi entrer en prison ! Donnez-moi une peine à perpétuité !"

Bref, tout ça pour dire que c'était pas gagné niveau identification avec les personnages.

Et c'était pas gagné non plus niveau style, puisque j'ai trouvé celui de M.L. Stedman quelque peu faiblard, si simple qu'il en devient simpliste, et parfois maladroit.

Pourtant, je dois bien l'avouer, je me suis laissée emporter par "Une vie entre deux océans". Page après page, je me suis prise de passion pour l'histoire de ce couple qui se débat avec ses propres mensonges et les événements terribles qu'ils ont provoqué. 

Ce n'est pas de la grande littérature, ce n'est pas du Steinbeck ou du Carson McCullers, mais ce livre procure un agréable moment de détente et de distraction.

Idéal, donc, pour meubler quelques heures de libre ou un voyage en train.

Quelques extraits :

"Janus Rock, c'était deux cent cinquante hectares de verdure, avec de l'herbe juste suffisante pour nourrir quelques moutons, des chèvres et une poignée de poulets, et assez de bonne terre pour cultiver un potager rudimentaire. Les seuls arbres de l'île étaient deux hauts pins de Norfolk plantés là par l'équipe d'ouvriers venus de Point Partageuse pour construire le phare et ses dépendances plus de trente ans auparavant, en 1889."

"Tom n'est pas un de ces hommes dont les jambes ne tenaient plus que par des écheveaux de tendons, ou dont les entrailles s'échappaient en cascade de leur corps comme des anguilles gluantes. Ses poumons n'avaient pas non plus été transformés en colle ou son cerveau en bouillie à cause des gaz. Mais il est malgré tout très marqué, puisqu'il doit vivre dans la même peau que l'homme qui a fait toutes ces choses qui ont dû être faites là-bas."         

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